jeudi 19 novembre 2009

3ième message - Inde touristique

Delhi, 17 octobre 2009.

Bonjour les amis!

Delhi, fin de parcours. Delhi où il est écrit que les pigeons de la ville ne dormiront pas cette nuit. C’est l’état de guerre depuis cet après-midi. Je suis dans ma chambre à peine à l’abri des bruits et du tumulte, des détonations et des pétarades. Tantôt nous étions à souper devant notre nouvel hôtel quand tout a débuté pour de bon, consternation. Il faut mentionner que suite à des malentendus dans nos réservations avec l’hôtel auquel j’ai voué une fidélité presque sans borne depuis mon premier séjour en Inde il y a plus de 20 ans, je parle de l’hôtel Anoop, j’ai mis fin à ce lien historique. Vous aurez fait de même si, après avoir pris la peine de faire une réservation claire, on vous avait gardé la pire des chambres à votre arrivée, tard en soirée, après une journée de voyage très éprouvante; et ce à 2 reprises à l’intérieur de 2 semaines. Le chic hôtel « Cottage Yes Please » est devenu, et sera désormais, mon pied à terre à Delhi. Un peu plus cher bien entendu, mais quel pas vers le confort! De grandes chambres aux sols de marbre blanc, literie impeccable de blancheur qui flaire bon le séchage au soleil, eau chaude toute la journée, savon et papier hygiénique dans la salle de bain, ait climatisée et ventilateur au plafond. Voilà quand on délit les cordons de la bourse et que l’on n’hésite pas à déposer presque 20,00 dollars canadiens par jour sur le comptoir de la réception.

Si ce n’était de cette guerre qui se déroule sous ma fenêtre ce soir je dirais que ce nouvel endroit est un havre de paix. Un pigeon a pris logis sur le rebord de ma fenêtre de salle de bain la nuit dernière, il y est resté jusqu’au petit matin à roucouler doucement pour accompagner mon sommeil. Ce soir il n’arrive pas à rester sur sa petite corniche, les fortes détonations répétitives le chassent à tout moment. Non, il est bien écrit que les pigeons ne dormiront pas cette nuit dans aucune grande ville de l’Inde. C’est le siège, et la raison en est simple, le Diwali, la grande fête de la lumière. Fête qui symbolise la victoire de la lumière sur les ténèbres, la victoire de la connaissance sur l’ignorance. L’équivalent de notre premier de l’an chez-nous, mais dans une version un peu plus philosophique et symbolique.

Il est dommage toutefois que la tradition d’allumer plusieurs petites chandelles au seuil de sa porte et sur le rebord des fenêtres des maisons ait été remplacée par des feux d’artifices, des bombes et des pétards de toutes sortes. Et que la paix de cette fête, la plus importante de l’Inde, se soit vue supplantée par un bruit infernal qui durera encore toute la nuit. Ma chambre donne sur une rue commerçante, toujours dans le cartier de Pahargang, une rue un peu en retrait du célèbre « main market ». Je ne fais pas seulement qu’entendre toutes ces détonations, je les vois par les « flashes » lumineux des pétards qui détonnent comme des bombes, tout juste au niveau de ma fenêtre. Je vous le redis, c’est la guerre. Il n’y aura donc pas seulement les volatiles qui auront leur sommeil troublé cette nuit. Heureusement c’est ma dernière nuit en Inde. Demain, après avoir fait la visite du musée d’art moderne de la ville, nous reviendrons ici pour préparer les bagages, c’est déjà le retour au bercail.

Si mes premières semaines se sont passées sur un mode très personnalisé, à revoir la famille de Chaina Ram, à aller passer quelques jours de grande paix chez les Pala dans cet oasis qu’elle le lac Dal et enfin à revoir ces adorables petits enfants tibétains qui deviennent avec les années un lien de plus en plus significatif, c’est maintenant la fibre touristique en moi qui reprend du service. Il y a des endroits dans ce pays qui sont peut-être moins accessibles tout simplement parce qu’ils ne sont pas dans un axe avec quelques autres destinations connues et incontournables. Endroits qui sont aussi des étapes obligatoires dans ces pays aux mille richesses, aux toujours impressionnantes splendeurs.

C’est ainsi que l’an passé nous avions cru possible d’ajouter les grottes d’Ajanta et Ellorâ sur notre trajet du sud de l’Inde. Aurangabad, ville située à plusieurs kilomètres à l’Est de Mumbaï, ce qui se calcule par de nombreuses heures de bus souvent inconfortable, avait alors été rayé de notre programme. Bien à regret puisque depuis longtemps j’entends parler de l’importance de voir ces lieux uniques en Inde, oui, encore d’autres lieux uniques que disait le « Lonely Planet ». Fallait-il y croire? Alors que j’étais encore à Montréal, quelques jours de mon départ pour l’Inde, j’avais reçu 2 appels téléphoniques, l’un de tante Thérèse et l’autre de ma copine Catherine. Toutes 2 avaient vu un reportage au canal Évasion concernant ces grottes situées au cœur du presque continent qu’est l’Inde. Je tiens à les rassurer, c’était bien dans notre itinéraire cette année, et cette fois-ci nous nous y sommes rendus.
















Je l’ai mentionné plus tôt dans mes messages, cette année nous voyageons plus confortablement, donc très souvent en avion. Nous nous envolions donc vers Aurangabad après une nuit dans une chambre de l’hôtel Anoop, chambre qui avait des airs de Beyrouth en déroute. Chambre sans aération située au 4ième étage de l’hôtel avec une seule fenêtre qui donnait sur le corridor. Une salle de bain avec toilette turque, ou à pédales pour ceux qui connaissent le terme sans l’associer à rien d’autre. Un ventilateur au plafond qui n’avait qu’une seule vitesse, rapide, et qu’il fallait bien endurer avec la chaleur suffocante de cette chambre fermée et sans climatisation. Et pour clore la description de ma geôle d’un soir, il faut ajouter que la peinture des murs et du plafond se désagrégeait à vue d’œil, des lambeaux de plâtre et de peinture tombaient sur le lit. Insalubre quoi. Nous étions arrivés tard le soir et repartions tôt le matin dans un taxi inconfortable qui a su brûler plus de feux rouges en un trajet de 20 kilomètres que moi dans toute une vie. Si on lui avait retiré des points « démérite » on lui aurait enlevé son permis de conduire pour ses 5 prochaines vies et il aurait pris le chemin de la prison à moins de 2 coins de rue de notre départ.

Le jour n’était pas encore levé. Notre vol intérieur pour Aurangabad partait à 6:00 du matin et allait durer un peu plus de 2 heures. Aurangabad, ville moyenne de l’Inde, n’a absolument rien d’attrayant. Si ce n’était de ces sites archéologiques très fréquentés que sont Ajanta et Ellorâ, Aurangabad serait totalement ignoré des touristes. Quelques hôtels de grand luxe sont cachés bien à l’abri des laideurs de la ville. Le nôtre est situé dans un cartier de gens plutôt à l’aise à en juger par les façades de certaines maisons, par les arrangements floraux des pelouses et des jardins. Nous sommes à quelques minutes d’une rue commerçante où il est facile de trouver les services de restauration, d’ATM et d’Internet. Pour la restauration nous allions être choyés, un restaurant recommandé par le « Guide du routard » a vite eu notre préférence et c’est là, et seulement là, que nous irons tous les soirs.

Personnel charmant, le propriétaire nous accueille avec un large sourire et profite de notre passage pour peaufiner son français. Les serveurs aux uniformes passés de mode, tout aussi classiques qu’empesés, s’activent à porter des plats à vous faire saliver. Ici presque tout ce qui est sur le menu passe par le four tandoori, immense récipient de terre cuite bien isolée, dans lequel des braises servent à cuire doucement le pain nan bien connu, mais aussi les pièces de viande, souvent du poulet ici, enduites de sauces succulentes et toutes aussi délicieuses pour le palais.





















Notre serveur préféré est un homme d’âge moyen à la tête de mafioso, forte mâchoire de macho barbe rude et forte, dents blanches qui contrastent avec le teint foncé du sud du pays, regard franc, direct et intimidant, chevelure abondamment enduite d’huile. Il suffit pourtant de s’apprivoiser juste un peu pour voir qu’il n’a rien du tueur à gages. Son anglais déficient ne le gêne pas pour engager une conversation. Il est curieux et on sent bien qu’il aimerait pouvoir commettre quelques questions indiscrètes pour mieux nous connaître. Fort sympathique en somme, nous l’avons adopté pour ce séjour à Aurangabad.

Notre arrêt, comme tous les prochains arrêts de ce voyage, est plutôt court. Nous en sommes à l’étape touristique de notre voyage comme je le disais. Étape de « découvertes » comme je le mentionnais aussi plus haut. Un tour organisé, et recommandé chaudement pas notre guide papier, aura la préférence sur la recherche d’un chauffeur à la dent longue avec qui il faudrait tout négocier, et presqu’assurément se faire flouer de plusieurs roupies. Le premier site à voir est situé non loin de la ville. Ellorâ, ces sont des grottes construites par les chefs politiques du 9ième et 10ième siècle puis remises par ces derniers à des moines pour qu’ils puissent y méditer et prier. Des grottes ont ainsi été remises à des moines bouddhistes, hindous er jaïns. Ce qui impressionne grandement ici c’est que ces grottes ont été sculptées dans un roc excessivement dur et ce à même la falaise. En tout 34 grottes bien numérotées et qu’il est facile de visiter en moins de 2 heures puisque notre guide indien nous amène aux plus importantes tout en nous donnant l’historique de chacune d’elles.





















La première grotte dans laquelle nous nous sommes trouvés allait tout de suite donner le ton. Façade finement sculptée de statues du Bouddha, nous passons la porte d’entrée pour arriver dans une grande salle au plafond élevé, sculpté de rainures transversales comme si on avait renversé une embarcation dans son plafond. Temple à l’intérieur duquel se trouve un autre temple, appelé ici le sanctum. Devant ce dernier, une sculpture gigantesque d’un Bouddha en méditation prend place. Notre guide nous donne même un aperçu de l’acoustique de l’endroit en chantant un doux mantra, le son se réverbère, prend de l’ampleur et de la rondeur dans cette salle aux murs de pierre marqués par les coups de ciseau des artisans qui y ont travaillés il y a plus de mille ans. Nous ne pouvions alors qu’imaginer à quel point, dans un endroit pareil, un chœur de moines en prières aurait pu élever nos âmes par leur communion mystique entonnées à la faveur des forces supérieures.

















Certaines grottes ont même été creusées pour donner 3 niveaux où les moines avaient leurs cellules pour la prière et la méditation. À tous les niveaux de ces monastères, les sculptures de Bouddha sont omniprésentes.
































La construction la plus impressionnante est un temple hindou d’une superficie incroyable qui a été construit en creusant de haut en bas tout en prenant soin de laisser ce qu’il faut de rocher pour sculpter les parties qui allaient constituées le temple final. L’œuvre est considérable et quasi démentielle pour l’architecte qui avait à y travailler. Le résultat est des plus réussi. Un raffinement artistique, tant les proportions du temple que le travail sculpté sur toutes les surfaces de ses murs est à jeter par terre.

Ce tour nous amènent aussi à divers endroits touristiques destinés beaucoup plus aux indiens qui forment habituellement la majorité de ces groupes. Des visites plus ou moins intéressantes du fait qu’elles ne nous mènent pas à des sites archéologiques très anciens comme c’était le cas pour les grottes d’Ellorâ. Vers la fin de ce tour, pour vous donner un exemple, nous nous arrêtions dans des temples hindous qui n’avaient rien d’historiques, mais étaient plutôt des endroits de culte actif où le pèlerin venait accumuler des sortes de « Air Miles » pour sa prochaine vie, ou encore avait un crédit sur un éventuel mauvais karma, une remise de péchés en somme, seulement du fait de s’être présenté devant la déité de l’endroit. Dans l’un de ceux-ci il fallait que les hommes se présentent le torse nu devant le lingam de Shiva. J’ai passé l’âge de faire l’effeuilleur pour obtenir ce que je veux, alors je suis tout simplement resté en dehors du temple à attendre ceux des indiens qui avaient fait ce « strip tease » partiel pour répondre aux règles de la place. Tant pis si je ne gagne les mérites associés à cette visite, je n’ai quand même pas tant de péchés à me faire pardonner par les dieux de l’Inde. Ces visites n’avaient donc que très peu d’intérêts et le touriste que je suis serait vite revenu à son hôtel après avoir vu les grottes d’Ellorâ qui l’avaient tant impressionné.

Il fallait faire bon usage de ce peu de temps alloué à la visite d’Aurangabad et dès le lendemain nous repartions vers ces autres grottes que sont les grottes d’Ajanta. Toujours dans un vieux bus indien qui crachait le mazout et contribuait agressivement à aggraver l’effet de serre de notre fragile planète. Nous étions une dizaine de personnes, un groupe encore une fois majoritairement constitué d’indiens visitant leur pays. Cette fois-ci une seule destination, les grottes d’Ajanta situées à plus de 100 kilomètres d’Aurangabad.

La route pour s’y rendre est une route de campagne, on y voit les paysans travailler aux champs. Ils y sont dès l’aurore et ne quitteront leur lieu de travail seulement qu’à la tombée du jour. Des femmes, des hommes qui, à ce temps-ci de l’année, récoltent le riz. Aujourd’hui le temps est plutôt gris et les nuages semblent annoncer une pluie. Il est donc impératif de terminer tous les travaux du jour pour mettre le riz à l’abri des intempéries. Les femmes sont dans les rizières et coupent les gerbes de riz, elles les amassent en bottes pour que les hommes les amènent ensuite au milieu du champ où un autre groupe d’hommes battra les épis pour en extraire le grain. D’autres femmes nettoient les résidus de paille et de terre avant de mettre la céréale dans de lourds sacs de jute. Un charriot tiré par un bœuf est là qui attend la fin des opérations pour ramener le fruit de la récolte de la journée qui sera mis bien à l’abri de l’humidité et des petits rongeurs de toutes sortes.

Les grottes d’Ajanta sont reconnues pour les peintures qu’elles renferment. Là aussi ce sont les puissants de l’époque, nous parlons ici du 2ième jusqu’au 6ième siècle, qui ont fait réaliser les travaux pour creuser le roc dans des falaises de pierre noire assez solides pour que l’œuvre soit immortalisée à jamais. Après avoir monté une trentaine de marches, le site s’ouvre majestueusement à nos yeux.



















En 1819, la découverte accidentelle de ce site par un anglais qui était à la chasse et a remarqué des falaises embourbées de végétations tropicales auxquels il croyait percevoir des travaux de sculpture, a mené à une des découvertes archéologiques des plus étonnantes. Les peintures bien préservées étaient d’une incroyable qualité artistique. Ici, comme à Ellorâ, les grottes avaient été construites en premier lieu pour les bouddhistes, ensuite les hindous et enfin les jaïns. Au nombre de 28 au total; nous pouvons, en les visitant, suivre l’évolution et le raffinement autant des sculptures que des œuvres peintes sur les murs intérieurs des temples que sont ces grottes.

Je n’arriverais jamais à vous décrire tout le contenu des scènes peintes dans ces grottes tant les artistes ont dépeint autant les scènes religieuses que les scènes de la vie de tous les jours. Je résumerais en disant que c’est tout simplement un festin pour les yeux et que je suis sorti de cette visite avec un torticolis carabiné tant toutes les surfaces de ces grottes regorgent de raffinement artistique. Le travail de restauration est magistral et il y a encore beaucoup à faire pour mettre en lumière toutes ces scènes peintes dans l’ensemble des temples de la place. Il faudra y revenir pour constater la presqu’impossible tâche à accomplir ici.














































Toutes les grottes suivantes formaient de l’extérieur un immense fer à cheval au-dessus d’une vallée luxuriante de végétation, dominant une rivière maintenant presque à sec, la Waghore. C’était le spectacle qu’avaient sous les yeux les moines qui vouaient leurs vies à la méditation et à la prière, bien loin des tentations du monde, dans une existence simple et dépouillée de tout désir. Enfin, ils y travaillaient à supprimer leurs désirs, pour le reste l’histoire est muette sur le sujet. Ce sont eux qui ont peints ces murs, le cœur et l’esprit orientés dans une spiritualité profonde.

Chacune de ces grottes avait sa beauté unique qu’il serait trop long à décrire dans ce texte. Toutefois la toute dernière avait quelque chose de bien particulier, elle était réservée à une représentation du Bouddha couché, se préparant pour son entrée au nirvana, la mort du Bouddha en somme.



















































Sur une longueur de peut-être 30 pieds gisait une sculpture sur le côté gauche du temple, elle représentait un Bouddha au sourire paisible. Ses disciples, peints sur les murs, étaient présents tout autour et l’assistaient dans cette phase ultime de sa vie. Ce n’est pas un hasard que cette dernière grotte qui ferme l’hémi cercle soit celle où l’on ait voulu représenter la mort du Bouddha et ainsi compléter le cycle de sa vie. Non, il n’y a rien de laisser au hasard ici, tout y a été conçu dans un plan bien orchestré, structuré. Ce qui en fait un endroit exceptionnel que je me suis plu énormément à enfin découvrir. C’est bien à regret que nous revenions sur nos pas pour conclure cette visite et nous livrer aux vendeurs du temple.

Si les trop nombreux vendeurs n’ont pas accès au site c’est de toute évidence pour ne pas faire fuir le tourisme de ce lieu. Passé l’enceinte du site des dizaines de vendeurs de toutes sortes nous assaillent littéralement pour nous vendre leurs produits. Et bien entendu à des prix exorbitants sachant que le touriste occidental n’a souvent aucune idée des prix du pays et se laisse facilement avoir. Nous sommes, bien entendu, les premiers à être abordés par les plus voraces d’entre eux. Les « good price », les « tell me your price », les « cheap price » fusent de partout. Ils en ont pris d’autres à ce jeu et ne reculent devant rien pour attraper de nouveaux poissons. Ce qu’ils ne savent pas c’est que toute cette agressivité à la vente repousse le touriste plutôt qu’il ne l’attire. Pour ma part, quand ce type de vendeurs se fait trop insistant, je n’hésite plus à utiliser le peu d’hindi que je connaisse et leur sort d’un ton pas du tout sympathique mon « Cello! Cello! » d’usage qui se résume simplement à « Va-t-en! Va-t-en! ». Parfois ça fonctionne, parfois ils s’en amusent et redoublent d’ardeur. Alors il ne reste qu’à les ignorer, ne rien dire pour quelques minutes et qu’ils comprennent que nous ne sommes pas faciles à appâter.

Ce temps alloué aux sites d’Ellorâ et Ajanta est passé bien vite. Après ces 2 dernières journées bien remplies nous volions vers Delhi où après quelques heures d’attente à l’aéroport national nous reprenions un vol vers Vârânasî. Nous avions l’intention d’y rester 3 jours dans notre plan initial, mais le Diwali approchait quand nous avons fait nos réservations de vols en Inde et nous avons dus nous résigner à n’y passer que 2 jours. La recherche d’un « guest house » fut un peu plus ardue que nous le pensions. Nous arrivions en fin d’après-midi alors que les touristes sont déjà installés dans les meilleurs. Nous avons dus nous rabattre sur un des « guest house » situé à l’intérieur de la vieille ville. Pour s’y rendre il fallait prendre, plus qu’à l’accoutumé, des ruelles très étroites où seules les piétons, les vaches et les motocyclettes peuvent circuler dans une coexistence « quasi » pacifique. Il fallait bien regarder où mettre les pieds car ces « sacrées vaches » ne se gênent pas pour laisser leurs déjections un peu partout dans ces ruelles déjà trop encombrées. D’où l’impression d’avoir à passer 2 jours dans une étable à ciel ouvert. Je dis souvent qu’il faut passer au-delà de l’odeur et de la saleté de l’Inde pour savoir l’apprécier, mais je dois avouer que je n’étais pas des plus convaincants à prêcher la parole cette fois-ci. J’en suis même arrivé à me demander si je ne m’étais pas trop exposé à cette ville au cours des années. Est-ce que j’y retournerai? Probablement, car malgré sa puanteur, son désordre, sa saleté et sa perpétuelle cacophonie, l’intense Vârânasî demeure un des points les plus importants à explorer dans la découverte de l’Inde religieuse.

Cette ville est un des lieux les plus importants du pays pour les indiens. C’est là que se font des crémations sur le bord du Gange, cette cérémonie est coûteuse pour l’indien moyen mais ils n’hésitent pas à engager ces frais pour offrir aux défunts la chance de couper court au cycle des réincarnations pour enfin atteindre le nirvana. Nous nous sommes rendus, à travers les dédales des rues qui mènent aux « burning ghats », assister à ces crémations. Parfois on y voit plus de 10 crémations en action. Cette fois-ci 5 ou 6 corps se consumaient sous les yeux de leurs familles et des curieux venus voir le déroulement de cette cérémonie. Il n’a pas fallu plus d’une minute pour qu’un indien, toujours le même que les années passées je crois, vienne m’aborder pour me dire que je n’avais pas le droit d’être là, que je devais me rendre à son bureau parce que j’enfreignais la règle du lieu n’étant pas hindou. Je sais que ceci est un autre « scam », un autre attrape touriste pour lui soutirer de l’argent qui aura pour seule utilité d’enrichir ces gens malhonnêtes qui tournent autour des ghâts à la recherche de la naïveté de certains. Et je réagis toujours avec autant de rage à leur présence, croyez-moi. Je n’ai absolument aucune patience avec eux. Et avant qu’il n’aille plus loin dans son histoire, je me suis mis à l’engueuler vivement, attirant ainsi le regard des gens qui m’entouraient, le traitant de malhonnête et de voleur et lui ordonnant de quitter les lieux sans tarder. J’ai dû être assez convainquant puisqu’il a disparu sans plus insister. Il y a quelques années la même scène s’était produite, il s’était éloigné et m’avais tiré des roches. Pourquoi faut-il que ces cupides imbéciles viennent troubler ce petit moment de grâce, car il y en a souvent qui se produisent à cet endroit?

C’est ainsi qu’un court moment s’est écoulé avant qu’un homme m’aborde pour me raconter ce qu’il était venu faire là. Il venait d’un village situé à une 40aine de kilomètres de Vârânasî pour la crémation de son jeune frère décédé d’un malaise cardiaque. Il m’indiquait sur lequel des bûchers le corps de son frère se consumait. Il était accompagné de 6 ou 7 membres de sa famille pour la cérémonie. Cette conversation est venue remettre de la paix suite à la rencontre initiale. Je le dis souvent, il n’y a pas de curiosité malsaine dans le fait d’aller assister à ces crémations, et très souvent dans le passé je m’y suis retrouvé, comme aujourd’hui, à recueillir dans un atmosphère de paix les confidences des personnes qui sont à faire le deuil d’un être cher.

De Vârânasî nous avions déjà vu les principaux points d’intérêt il y a 4 ans alors que Louise y mettait les pieds pour la première fois. Pour ma part je m’y étais rendu en compagnie de Chaina Ram la première année que je l’avais rencontré, puis retourné encore et encore en sa compagnie les années suivantes puisque les villes sacrées étaient nos lieux touristiques à nous, tout comme ils le sont pour la très grande majorité des indiens qui voyagent en leur pays. Le soir avant notre départ, même si nous avions déjà été témoins de cette cérémonie dans le passé, nous sommes allés assister de nouveau à la cérémonie du « Aarti », célébration de la lumière, qui se passe sur les abords du Gange à la nuit tombante.




































7 brahmanes montent sur des plateformes situées aux abords du fleuve sacré et au son des chants et de la musique offrent la lumière sous plusieurs formes au Gange, fleuve Mère de l’hindouisme. C’est dans un synchronisme parfait des officiants que se déroule cette cérémonie qui dure presque 1 heure. Une foule désordonnée y assiste et à un point précis de cette cérémonie, des offrandes sont faites au fleuve par les participants.






















Une feuille de banian séchée et repliée pour former un récipient flottant est remplie de fleurs, encens, fil de coton, et un lampion situé au milieu de ces offrandes est allumé. Ils placent délicatement ce contenant sur le fleuve. C’est ainsi que des dizaines de petites lumières prendront le large et descendent sur le Gange pour le célébrer l’offrande de la lumière, le « Aarti ».
















Le lendemain matin, nous nous levons tôt, avant la lumière du jour, pour aller voir les pieux hindous qui allaient faire leur puja matinal au bord du Gange. Force nous est de constater que de plus en plus, ce qui devrait être un moment paisible, en communion avec les dévots, se transforme en une sorte de foire où le tourisme autant occidental qu’indien se rue dans des embarcations menées par des rameurs plus ou moins vaillants. Tout le monde veut saisir la photo qui sera celle-là même qui rivalisera avec celle qui se trouve dans les livres qui illustrent si bien ce rite matinal des pieux pèlerins en visite à Vârânasî. Ce qui donne droit à des scènes disgracieuses où ces petits bateaux s’entrechoquent pour se trouver aux premières loges aux abords du fleuve, près des pèlerins prenant contact avec le fleuve. Notre rameur n’était pas des plus vaillants, nous l’avons vite constaté et n’avons pas insisté. Nous ne voulions pas participer à la ruée touristique plus qu’il ne le fallait.

















Cette année le fleuve est plus haut qu’il ne l’est habituellement, les moussons ont été longues, fortes et tardives. Les rameurs peinent à remonter le courant recherchant les contre courants sur le bord du fleuve, raison de tout ce cafouillage de petits bateaux qui vient déranger les pieux pèlerins éclairés par les premiers rayons de soleil du jour. Rituel qui se répète inlassablement depuis des lunes et des lunes.



































































Nous avons quand même regardé silencieusement ces indiennes et indiens de classe moyenne se plonger littéralement dans les eaux boueuses du fleuve sacré, récitant des prières, offrant des couronnes de chrysanthème jaune et d’autres offrandes au courant qui les a vite fait dériver vers le delta beaucoup plus loin. Et ces autres enduits de savon, qui profitent de l’occasion pour se nettoyer autant l’âme que le corps. Et ce groupe de jeunes moines dirigé par un maître, pratiquant leur yoga matinal.
















Tandis que d’autres étaient déjà, si tôt le matin, à faire la lessive des draps et rideaux d’hôtel séchant sur les rampes ou sur les pierres en retrait des ghâts.

















Toute cette joyeuse et grouillante activité se passait sous les yeux des chiens errants qui, enfin, avaient cessés leurs aboiements nocturnes.
















Nous avions réservé les services de notre rameur pour 2 heures, alors il travaillait « à l’heure » comme on dit, employant son temps beaucoup plus à s’étirer paresseusement qu’à le maximiser en remontant le Gange plus en hauteur et nous faire voir les premiers ghâts en aval du fleuve pour ensuite redescendre en amont et y voir la grande mosquée, forteresse surplombant le paysage. Nous nous sommes rendus à la hauteur de la mosquée après insistance, un bref arrêt devant le Manikarnika ghâts nous a permis de voir que déjà à cet heure du matin on y était à l’œuvre. Des bûchers en étaient à la fin du rituel de crémation. Déjà un cadavre était partiellement immergé dans les eaux du Gange attendant que la famille ait complété les achats de bois et de poudre de santal qui serviront à la crémation de leur mort. Un léger brouillard, ou était-ce les fumées des derniers bûchers, recouvrait la scène paisible alors que seuls quelques personnes occupaient l’endroit qui n’avait pas encore repris l’effervescence que lui connaîtra le jour.

Louise et moi nous sommes d’accord sur un point, peut-être avons-nous trop vu Vârânasî maintenant et le charme initial ne veut plus opérer sur nous. Tout de suite après notre sortie sur le Gange nous quittons cette ville pour une autre, ces déplacements sont le lot du voyageur insatiable.

Prochaine étape: Khajurâho. S’il y a une ville en Inde qui est presque aussi connue qu’Agra, site du Taj Mahal, c’est bien Khajurâho. Plusieurs d’entre vous avez peut-être entendu parler du Kama Sutra, livre sacré tout aussi important que la Bhâgavata Gita, ou le Maha Barata. Et bien voilà, les très célebres temples de Khajurâho sont les seuls temples de l’Inde sur lesquels des scènes sexuelles très explicites ont été gravées sur les murs des temples. Ce qui en fait en soi une destination pour les voyeurs, que nous ne sommes pas, rassurez-vous.

Notre court vol entre Vârânasî et Khajurâho nous laissait presque dans la petite ville qui n’a d’intérêt que la visite de ses temples. On nous avait pisté sur un hôtel de la place, le chauffeur de taxi d’Aurangabad avait probablement un frère, ou un beau-frère, ou quelque autre parent qui lui rendrait des faveurs si il moussait la publicité pour le « Marble Palace Hotel » de Khajurâho. L’endroit avait de grandes chambres très intéressantes, mais il a fallu négocier le prix pour que ça entre dans le budget que je tiens toujours serré quand il est question de chambres d’hôtel. On s’en tirerait donc à moins de 20.00 dollars encore cette fois-ci.

Ce village plus que ville fourmille de vendeurs et bien entendu le harcèlement se fait plutôt fréquent. Nous avons pu constater que notre expérience de ce voyage a payé en quelque sorte puisque nos propres méthodes pour éloigner les vendeurs du temple ont été des plus efficaces. Nous avons vite adopté un restaurant qui nous servait entre autre des pizzas minces et absolument délicieuses, je vous recommande la « 4 fromages ». Au diable les chappattis, le nan, le tandoori, le cari et toutes autres saveurs indiennes. Notre appétit nord-américain commence réellement à refaire surface.

Pour ce qui est des temples de Khajurâho, ils sont regroupés sur 3 secteurs autour de ce village. Il est facile de tout faire à pied. Le groupe le plus important est situé à 5 minutes de notre hôtel, il s’agit du groupe de l’Ouest.






C’est là que le ministère de la culture a investi ses sous et pour cause. On y retrouve 5 temples bien espacés les uns des autres sur un site ou des arbres immenses, des fleurs et des pelouses fournies et vert tendre donnent à l’endroit la fraîcheur nécessaire à cette visite que nous faisons alors que le thermomètre frise le 40 degré Celsius.
J’ai vu bien des temples magnifiques en Inde dans toutes mes années de pèlerinage dans ce pays. Dans ce présent voyage j’avais encore une fois été vivement surpris par cette nouvelle découverte des grottes d’Ajanta et Ellorâ. Maintenant je me demandais, comment pouvais-je avoir délaissé Khajurâho toutes ces années durant? L’œuvre des sculpteurs indiens m’a toujours fasciné, l’Inde est un musée à ciel ouvert, et encore ici j’allais le constater.


Ces temples qui ne prêchent pas par leur démesure dimensionnelle sont un des plus beaux exemples de la patience pour atteindre la perfection. Toutes les sculptures entourant ces temples sont des œuvres d’art uniques en soi, et « dieux » il y en a des centaines autour d’un seul. Ce qu’il y a de très particuliers à Khajurâho c’est que ce sont souvent les femmes qui sont mises à l’honneur dans des gestuels de tous les jours. Les temples, dédiés aux dieux Vishnu, Shiva, Parvati, Surya, regorgent de sculptures délicates dédiées à la sensualité féminine.




Le raffinement apporté à chacune des œuvres est plus que remarquable. La grâce des corps à moitié dénudés, leurs poses sensuelles, leurs regards complices en font des poèmes dédiés à la femme. De petites frises nous renseignent sur les combats et les succès militaires tandis que d’autres présentent des scènes de la vie de tous les jours, la chasse, les travaux de construction, les travaux ménagers ou ceux des champs.


Les frises supérieures sont dédiées au monde spirituel alors que des armées d’apsaras, déesses vaporeuses, voltigent au-dessus des dieux et des humains. Un réel festin pour l’œil que tout ceci. Même la chaleur de cette journée torride ne vient pas altérer le plaisir et toute cette admiration que l’on découvre pour ces artistes qui se sont réunis au 9ième et 10ième siècle de notre aire. Heureusement le climat sec de cette région de l’Inde a contribué à la conservation de ces œuvres d’une impressionnante beauté.










L’une de ces femmes est à s’appliquer du khôl sur les yeux, l’autre se regarde dans un petit miroir alors qu’une autre plus loin relève le pied pour s’enlever une écharde du pied dans un naturel qui ne se retrouve que dans les temples de Khajurâho, et nulle part ailleurs dans ce vaste pays qu’est l’Inde.

Étonnamment les scènes représentant les dieux se juxtaposent aux scènes de la vie de tous les jours comme je le disais. C’est le cas entre autre des représentations du Kama Sutra avec des poses érotiques que je vous mets au défi de pratiquer. Pour certaines d’entres elles on arrive même à me demander si les artistes contorsionnistes du « Cirque du Soleil » seraient habilités à les performer.


On ne se surprend pas d’y trouver aussi des scènes de ménage à 3 ou à 4, ou encore une scène où l’homme avait un cheval pour assouvir ses besoins sexuels.



On prétend que ces temples avaient peut-être pour but d’enseigner l’art de faire l’amour aux jeunes adolescents du temps. J’en conclus que nous sommes devenus bien puritains avec « les siècles des siècles, amen! ». Ce ne sont pas nos curés qui nous auraient remis un livre d’images constituées de ce que l’on trouve ici immortalisé sur ces murs. Avec eux nous avons plutôt eu droit à l’imaginaire représentation de l’enfer et de ses effroyables sévices.

Ici rien ne m’apparaît pourtant choquant tant sur ces murs millénaires l’art pur est prédominante sur les sujets qui y sont représentés. Gandhi n’en aurait pas dit autant quand on l’a amené sur ce site il y a plusieurs années. Je le soupçonne de s’être rangé du côté des puritains de ce siècle puisqu’il aurait souhaité que les représentations érotiques soient retirées des murs des temples. C’est heureux qu’on lui ait tenu tête.

Après cette visite du groupe de l’Ouest nous sommes allés reprendre des forces et surtout nous réhydrater. Nous avions encore le groupe de l’Est sur le programme de notre journée. Lui aussi situé non loin du village pouvait se faire à pied. Si ce groupe est moins important ce n’est pas parce qu’il représente moins l’art de cet époque. Ces temples sont aussi anciens que les premiers. La forme de ceux-ci est similaire, les dieux sur les murs extérieurs sont les mêmes, parfois on y retrouve aussi des scènes érotiques et la réalisation des œuvres est égale au premier site. Ces temples ne sont pas regroupés sur un seul site et il faut marcher un peu plus pour arriver à tous les visiter. Ce qui fait que le tourisme de masse, en autobus climatisé quoi, se contente habituellement du premier groupe avant de reprendre la route vers d’autres horizons. Ils n’ont pas réellement tort de le faire puisque tous les autres temples ne sont que les répétitions des premiers. Cette visite de ce 2ième groupe nous permet tout de même de passer à travers le village initial qu’était Khajurâho, de voir les maisons, la vie de tous les jours et ses habitants avec qui nous avons échangés un brin de conversation.



On se prépare au Diwali qui approche, dans le village on applique de la peinture fraîche aux maisons, tandis que la rivière toute proche est grouillante de monde qui s’affaire à laver le linge et à se laver eux-mêmes.


Tout doit être pur, tout doit être blanc et propre pour cette fête importante. Ce qui se passe ici se passe aussi dans toutes les villes et villages de l’Inde.



Il nous restait encore quelques temples à voir en fin de journée, nous gardions la dernière visite de ces temples plus éloignés pour le lendemain matin. Nous avions suffisamment de temps pour ce faire avant notre vol qui allait nous ramener à Delhi. Le groupe du Sud, le dernier des trois, s’est fait après une négociation de rickshaw. Encore là des temples datant des 9ième et 10ième siècle, peu de nouveau, du déjà vu dans un décor entouré de champs déserts et arides à ce temps-ci de l’année. Seuls les abords immédiats des temples sont recouverts de cette pelouse verte et des arrangements floraux impeccables. Même sujets sculptés sur les murs extérieurs de ces nouveaux temples, autant de raffinement. Mais il faut faire vite, revenir à l’hôtel et nous préparer pour le départ. Au décollage de ce vol un dernier regard en plongé sur l’ensemble des temples que nous survolons pour un instant. En tête une seule chose, y revenir dans un jour prochain.

Revenir à Delhi après cet autre havre de paix qu’a été Khajurâho nous démontre la difficulté que tous les voyageurs ont à apprivoiser cette ville capitale. C’est le retour plus brutal, le choc initial renouvelé dans le chaos perpétuel qui règne ici. La ville, en plus d’être elle-même, se prépare au Diwali, voire un élément chaotique supplémentaire à l’intérieur de ce qui déjà pourrait se qualifier d’insupportable. Ceux qui ont voyagés assez longtemps dans des endroits pareils savent que nous sommes peut-être moins tolérants quand tire la fin du périple tant rêvé initialement. C’est un peu dans cet esprit que nous retrouvons la capitale indienne, mais Louise a su trouver un baume pour ces dernières heures. Nous avons déjà au programme la visite du Musée d’Art Moderne et bien entendu une bonne adresse pour le magasinage de dernière minute. Après une négociation houleuse avec des rickshaws man plutôt enclin à nous amener dans les magasins de leurs amis, ce qui revient à dire à se faire escroquer honteusement, un homme se présente et nous offre de nous amener aux endroits demandés sans même exiger une somme exagérée comme la plupart de ces derniers le font quand ils ont affaire aux touristes. Nous nous rendons hors de la ville, une balade de plus de 30 minutes nous rend au centre d’achats des riches de la ville. On se croirait chez-nous. Sensiblement les mêmes boutiques, les mêmes chaînes de restauration et aussi les mêmes prix. C’est à se demander qui peut venir acheter ici. Pourtant, est-ce pour cause de Diwali?, il y a foule et les achats vont bon train. Il y a donc des classes moyenne ou riche dans les cartiers situés en dehors du centre-ville, nous venons d’en faire la preuve.

Notre sympathique conducteur de rickshaw revient à l’heure demandée et nous laisse devant le Musée d’Art Moderne. Belle découverte, il vient d’être rénové. Les œuvres sont disposées très agréablement dans une large galerie bien éclairée. On y découvre les peintres modernes de l’Inde et leur créativité souvent inspirée de thèmes religieux hindous. D’autres ont subit l’influence de l’extérieur pour y avoir étudié quelques années. Tout ceci offre un mélange harmonieux malgré les contrastes évidents qu’on aurait pu deviner dans ce mélange de genres.

Bientôt le temps du départ. Pour une fois nous ne croulons pas sous des tonnes de bagages pour le chemin du retour. Nous n’aurons pas à débourser des suppléments pour les excédents de poids cette année. Est-ce que par hasard nous deviendrions plus « zen « ? J’entends des sarcasmes ici, nous savons très bien qu’il y a encore beaucoup de route à parcourir avant d’atteindre cette sainte caractéristique. Et je crois que je ne me ferai pas disciple du dépouillement dans cette présente vie. Je l’assume.

Un bruissement d’aile. Une ombre dans la fenêtre qui donne sur la rue. C’est mon petit pigeon qui est revenu. Comment deviner s’il est fatigué de son début de nuit perturbé par tout ce bruit qui le faisait fuir d’un coin à l’autre de la ville? Il s’installe sur la corniche de la fenêtre, jette un dernier regard aux alentours pour s’assurer de sa sécurité, rentre sa tête sous le plumage gris de son aile et s’endort finalement après cette autre guerre diwalienne.

Pour nous il reste de nombreuses heures de vol pour le retour à la maison. Heures qui seront largement occupées à revivre en pensée les moments de bonheur que m’a procuré cette autre route de l’Inde qui est maintenant à mon actif. Je n’en finirai jamais de revenir ici.



Pierre Gamache